Leviathan News : Dyad et QiDAO

Source : https://www.youtube.com/watch?v=VNgIJYIRmGE

Leviathan News : Dyad et QiDAO

Point sur QiDAO

L'histoire du depeg avec le stablecoin MAI (1:00)

QiDAO est un émetteur de stablecoin qui a la particularité de pouvoir créer des stablecoins sur plusieurs blockchain, et qui a été affecté par le hack du bridge Multichain sur Fantom.

Le hack a causé de la mauvaise dette sur QiDAO, et son stablecoin appelé "MAI" s'est dépegé et est descendu jusqu'à 0,80$.

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Mauvaise dette : dette sans collatéral à disposition pour être remboursée. Il peut arriver que certaines positions sur un protocole soient insolvables. Si la mauvaise dette est trop importante, le protocole risque de mourir

Après le hack, toutes les chaînes ont voté pour arrêter les bridges entre les chaînes afin de geler l'exposition à la mauvaise dette venant de Fantom.

L'équipe de QiDAO n'avait pas la majorité des jetons de gouvernance (puisque leurs tokens QI ont été volés aussi), donc les décisions importantes doivent passer par un vote communautaire.

Après des mois de discussions, il a été décidé d'adopter une approche chaîne par chaîne pour que le MAI retrouve son peg. Certaines chaînes comme Ethereum n'étaient pas beaucoup exposées est le MAI était déjà repeggé à 0,99$ sur ce réseau

En parallèle, plusieurs mesures ont été adoptées pour restabiliser le MAI :

  • Limites de transferts entre les chaînes
  • Stability pool pour les liquidations
  • Utiliser 50% des revenus du protocole pour racheter du MAI
  • Mettre en pause les emprunts sur les réseaux où le MAI est depeg
  • Déployer QiDAO sur d'autres Layer 2 pour augmenter les revenus

QiDAO espère repegger MAI au Q1/Q2 2024 et éliminer la mauvaise dette d'ici fin 2024 pour reprendre sa croissance.

QiDAO se montre optimiste (7:30)

La demande pour les stablecoins et le levier se relance, ce qui est positif pour l'industrie des stablecoins et la crypto en général.

QiDAO a un des coûts en capital les plus faible dans le secteur des stablecoins, qui se situe entre 0 et 2% en fonction des blockchains. Autrement dit, dès que les frais sont supérieurs à 2%, QiDAO est rentable.

La béné/malé diction des taux d'intérêts (9:30)

L'augmentation des taux d'intérêt est à la fois une bénédiction et une malédiction pour les stablecoins

  • 😇Cela permet à QiDAO d'accroître ses revenus et de repeg le MAI plus vite
  • 👿Les protocoles sont forcés à s'adapter au taux d'intérêt moyen du marché, faute de quoi ils deviennent moins compétitifs

Proposer un taux d'intérêt inférieur à la concurrence s'avère détrimental pour le business model des stablecoins, puisque les utilisateurs font des carry trades

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Carry Trade (ou “stratégie de portage”) : Opération qui consiste à s’endetter sur un actif à faible taux d'intérêt et placer les fonds empruntés sur un autre actif dont le taux d'intérêt est supérieur

Le but de la manoeuvre est de profiter de la différence des taux d’intérêts

Un exemple de ce problème est Liquity qui ne facture aucun taux d'intérêt, donc les utilisateurs vendent leur LUSD pour des sDAI

Autre exemple : le stablecoin GHO proposait au lancement un taux d'intérêt inférieur à la concurrence. Les utilisateurs vendaient leur GHO pour des sDAI à un tel point que le GHO a depeg. En remontant les taux d'intérêt, le peg du GHO a été partiellement rétabli

Point sur Dyad

Joey Roth (Dyad) rejoint le chat (13:00)

Les stablecoins ont démontré avoir un véritable adéquation produit/marché (product market fit) en crypto, au même titre que le trading. Ils sont utiles pour de nombreux cas d'usage en DeFi, at aussi en tant que moyen de paiement

Cependant, il reste encore des problèmes d'économie de l'unité (unit economics) dans l'industrie des stablecoins en général :

Les émetteurs de stablecoins centralisés comme USDC ou USDT gardent le rendement des actifs détenus dans leurs réserves tout en émettant des stablecoins à 1$. Tether a réalisé plusieurs milliards de bénéfices net au cours de 2023, mais seuls les employés de Tether en profitent.

Les stablecoins décentralisés permettent aux utilisateurs de devenir leur propre banque centrale et de tirer parti ce cette activité, mais ces stablecoins coûtent plus d'1$ à produire et à maintenir, ce qui limite leur croissance face aux émetteurs centralisés.

La réponse de Dyad à ces problèmes (17:15)

De nouveaux designs de stablecoins comme Dyad tentent de résoudre ces problèmes.

Dyad se base sur un système de prêt lombard (appelé "CDP" en anglais pour Collateral Debt Position). Une position sur Dyad est appelée une "note" et cette-ci confère des tokens appelés "Kerosene" pour émettre des stablecoins DYAD à partir du collatéral excédentaire.

Cela permet de réhypothéquer le collatéral inutilisé et d'améliorer l'efficience du capital pour se rapprocher de celle des stables centralisés comme USDC/USDT

Le pari de Dyad consiste à dépasser les performances des stables centralisés une fois qu'ils auront intégré une diversité plus large de collatéraux

Le token Kerosene (21:00)

Après l'effondrement de Terra, les gens ne son plus vraiment motivés à l'idée d'un stablecoin avec un collatéral endogène pour les stablecoins.

Le token Kerosene de Dyad est un hybride entre collatéral endogène et exogène. Sa valeur est déterminée par le montant de collatéral exogène par rapport à la dette dans le système.

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Endogène : qui provient du protocole lui-même
Exemple : Le collatéral des stablecoins de la blockchain Terra étaient basés sur les tokens LUNA, donc entièrement dépendants de Terra

Exogène : qui provient d'entités extérieures au protocole concerné
Exemple : Liquity émet ses stablecoins à partir de l'ETH, qui est complètement extérieur au protocole Liquity (avec ou sans ETH, le protocole continue d'exister)

En d'autres termes, le Kerosene ne fournit pas de collatéral additionnel au système mais permet de réutiliser le collatéral existant (de la même façon qu'une hypothèque)

Le fonctionnement des notes et du Kerosene sur Dyad (37:30)

Sur Dyad, les notes sont sous forme de NFTs. Pour inciter la liquidité de manière durable, plus on garde la note longtemps, plus elle nous fait gagner de kerosene.

La présence de Kerosene dans la note accroît aussi la valeur de cette dernière sur le marché secondaire : une note avec plus d'ancienneté octroie plus de tokens Kerosene, donc se valorise mieux.

En parallèle, Dyad fait le choix de ne pas avoir de token de gouvernance et de confier un vote à l'utilisateur qui possède une note. Plus un utilisateur possède de notes, plus son pouvoir de vote est important.

Le problème des stablecoins plus anciens est qu'il y a un conflit d'intérêt entre les utilisateurs émettant des stablecoins et les utilisateurs possédant des tokens de gouvernance. Dyad tente de faire converger ces intérêts car pour pouvoir voter, il faut "jouer sa peau".

La notion de "prime de risque"

Qu'est-ce que la prime de risque ? (26:00)

La prime de risque est l'écart de rendement ou de prix entre un actif risqué et un actif sans risque.

Par exemple :

  • Les obligations d'État sont considérées sans risque. Si on achète une obligation d'État qui rapporte 2% par an, c'est le taux sans risque
  • Les obligations d'entreprises rapportent 5%/an, mais sont plus risquées

La prime de risque de notre exemple est de 3%/an, pour compenser l'investisseur qui accepte de prendre un risque supérieur.

Cette notion de "prime de risque" s'applique aussi aux cryptos : étant donné que les stablecoins décentralisés récents sont plus risqués par nature, ils doivent proposer plus d'incentives pour attirer les investisseurs

Pour Joey, Les LST/LRT (Liquid Staking Token / Liquid Restaked Token) seuls ne peuvent pas résoudre ce problème de prime de risque pour les stablecoins décentralisés qui reposent sur un système de prêt lombard

En parallèle, maximiser l'efficacité en capital peut nuire au maintien à long terme du stablecoin. Il faut trouver un équilibre.

L'exemple de Curve a montré l'importance de la structure d'incitation (carotte et bâton) qui propose la prime de risque nécessaire pour attirer et retenir la liquidité dans les protocoles DeFi.

Etre immuable dans un monde qui ne l'est pas (30:30)

Benjamin de QiDAO pense qu'essayer de rendre un protocole complètement immuable est illusoire car le monde change constamment. Même si on pense qu'un protocole est immuable, si le monde évolue, la dynamique du protocole va changer malgré nous

  • Liquity a souffert en termes d'efficacité du capital à cause de son caractère immuable. À l'heure actuelle, il faut un ratio de collatéral à 405% pour être considéré comme sûr (pour 1$ de LUSD, il faut 4.05$ d'ETH)
  • À l'inverse, Prisma qui n'est pas immuable a pu ajuster ses taux d'intérêts à 4%, et possède un ratio de collatéral moyen de 270%

L'immuabilité empêche d'adapter sa prime de risque

Les intégrations de Curve et Convex (31:45)

L'intégration à Curve et Convex est utilisée par certains protocoles de stablecoins comme Frax et Prisma pour gérer leurs coûts de liquidité.

Le but est de dépenser 1$ du jeton natif de l'émetteur de stablecoin et d'obtenir en échange plus d'1$ de récompenses sous forme de liquidité grâce aux votes sur Curve.

Frax arrivait à obtenir jusqu'à 4$ de récompenses Curve/Convex pour chaque 1$ de FXS dépensé.

Mais ce n'est pas scalable car quand la TVL augmente, Curve n'est pas en capacité de donner des retours sur investissement de 500% sur les votes indéfiniment.

Bien que Curve offre les meilleures performances pour maintenir le peg, le coût en capital pour les récompenses de liquidité y est trop élevé pour la plupart des émetteurs de stablecoins.

La nécessité d'adopter les Layer 2 (35:00)

Curve et Uniswap ont pris du retard dans l'adoption des Layer 2 par rapport à des plateformes d'échange décentralisées (DEX) qui se sont d'abord lancées sur les Layer 2 comme Camelot sur Abritrum ou Velodrome sur Optimism

En tant qu'émetteur de stablecoin, il est important de faire du business development auprès des communautés L2 émergentes, car l'absence de Curve et de Uniswap ouvre la voie à de nombreuses opportunités pour les coûts de liquidité.

Autrement dit, les Layer 2 proposent une prime de risque intéressante

Concevoir un système de liquidation

Le système de liquidation de Dyad (41:30)

Benjamin souligne l'importance pour QiDAO de gérer le risque de liquidation, et le risque cross-chain (si un problème sur une chaîne affecte les autres). Il se demande comment Dyad envisage ces risques de liquidation et de corrélation entre chaînes.

Joey répond que Dyad a un système basique de liquidation où n'importe qui peut liquider une position sous-collatéralisée et récupérer la dette + 20% du collatéral.

Pour éviter que la liquidation n'ait un impact sur le prix, le collatéral est juste transféré à un autre NFT

Les 2 plus gros risques pour les liquidations sont les suivants :

  1. La valeur du collatéral baisse trop pour inciter à liquider
  2. La vente forcée du collatéral affecte son prix.

Chez Dyad, la liquidation vise plutôt à se protéger d'une faillite, tandis que les incentives visent à maintenir le peg.

Les liquidations ne sont pas si difficiles à résoudre, de bons systèmes comme Aave et QiDAO ont bien géré des crises. L'important est d'éviter la spirale de la mort en permettant de racheter la position à risque avant d'atteindre le point de non-retour

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Spirale de la mort "death spiral" : Situation dans laquelle il y a un défaut de paiement, mais où l'entité en défaut s'endette encore plus pour rembourser son défaut initial pour au final créer un défaut de paiement encore plus gros, et ainsi de suite jusqu'à l'effondrement du système

Exemples : Terra, FTX, les entreprises zombies...

En pratique il y a toujours des arbitragistes pour profiter de l'opportunité des liquidations dans la finance décentralisée. Donc le système fonctionne tant que la valeur du collatéral ne s'effondre pas totalement.

C'est certainement le bon moment pour créer des bots de liquidations sur Dyad...

Le système de QiDAO (49:20)

Chez QiDAO, quand un utilisateur emprunte un stablecoin et que la valeur de sa garantie est inférieure à un certain seuil par rapport à sa dette, il peut être liquidé.

Mais QiDAO compte proposer un autre système de liquidation, et s'inspire du design "LLAMMA" de Curve qui permet de racheter automatiquement sa position quand le prix du collatéral baisse trop pour éviter d'être liquidé :

  • Utiliser des LP tokens (tokens qui fournissent des liquidités sur des pools données) comme garantie.
  • Permettre à chaque emprunteur de définir son propre "stop loss" personnalisé pour la liquidation automatique.
  • Convertir progressivement la garantie en l'actif emprunté à mesure que le prix se rapproche du niveau de liquidation.
  • Utiliser des plateformes d'échange décentralisées pour couvrir le risque de prix et faciliter les liquidations.

Ce modèle ressemble beaucoup au BAMM de Fraxswap.

Le problème principal de ce design est qu'il faut sortir des liquidités pour alimenter les DEXs. Une solution à ce problème est d'utiliser un "Peg Stability Module" dans lequel n'importe quel utilisateur peut y déposer ses stablecoins émis afin qu'il soient utilisés pour faciliter les liquidations, et être rémunéré pour les liquidités fournies

Optimiser le Peg Stability Module "PSM" (56:30)

Le stability pool de Liquity est un mécanisme intéressant de PSM, mais cela nuit à la vélocité du LUSD.

Cela pourrait être amélioré en créant un marché prédictif sur le prix futur (d'une certaine façon, Liquity V2 bosse déjà dessus)

D'autres protocoles comme DOLA ont également adopté ce modèle, car cela permet d'augmenter les fees sur les emprunts qui vont directement aux détenteurs de stablecoins.

On peut voir le token Kerosene de Dyad comme un PSM puisqu'il capture toute la valeur de la croissance du protocole et du collatéral excédentaire. En parallèle, le prix du Kerosene est déterminé par le protocole mais peut se négocier avec un premium sur le marché secondaire.

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Premium : montant supplémentaire payé par rapport à la valeur normale d'un actif

À l'inverse, le discount exprime le montant déduit par rapport à la valeur normale d'un actif